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Jommelières (24) : plaque commémorative du groupe Manu et de la 2ème Compagnie Brigade Rac.

Rédigé par Alan dans la rubrique Brigade RacLieu de mémoire

Cette année pendant la commémoration de la bataille de Javerlhac le 24 juillet 1944 une plaque a été inaugurée au lieu-dit Jommelières commémorant la creation du groupe Manu et de la 2ème Compagnie Brigade Rac.


La plaque est installée sur l'ancienne maison familiale de Manuel Acébès au lieu-dit Jommelières 2,5 km de Javerlhac vers Nontron. Manuel a été l'un des protagonistes de ce qui constitue certainement l'épisode militaire le plus marquant de la lutte armée en Dordogne nord avant la libération du département, la bataille de Javerlhac.



Ici au printemps 1944, à l'initiative de Manuel Acébès et de son épouse (Marie-Louise), a été formé dans la clandestinité le groupe Manu. Réunis au groupe Letheuil de Marthon, ces jeunes réfractaires sont devenus la 2e Cie de la Brigade Rac qui a participé à la libération du Sud-Ouest



Manuel Acébès, dit " Manu "              (Tiré de l'ouvrage La brigade Rac par capitaine Fred)

Basque espagnol, né à Onesto, province de Bilbao, en 1908 ; sa famille est venue s'installer à Bordeaux en 1911. Il n'a jamais parlé, en réalité, que le français. À vingt et un ans, il opte forcément pour la France et fait son service militaire au 57e R.I., régiment avec lequel, rappelé, il part à la guerre de 1939.Fait prisonnier, il s'évade mais ne veut pas revenir en zone occupée à Bordeaux, son ancien domicile. Il s'installe à Javerlhac, pays de sa femme, en zone libre. Excellent ébéniste, il se fait une clientèle. Quand le moment vient pour lui de manifester son amour de la France, il est le premier résistant de son village et constitue un groupe très actif le groupe « radio », qui le 6 juin, prend les bois de Picpeyrou, près de Javerlhac, et couche dans les ruines d'une ancienne usine abandonnée.

Manuel Acébès

Manu est un chef, et l'on admire dans le pays la discipline de ses hommes ; il a établi un barrage permanent à la limite des départements Charente-Dordogne et téléphone souvent à Nontron pour signaler le mouvement des troupes ennemies. Le grade de lieutenant lui est conféré en même temps que le commandement de la 2e Compagnie qui rassemble non seulement son groupe initial mais les autres maquis du voisinage. Lorsque, le 24 juillet 1944, la colonne de répression composée d'Allemands et de miliciens qui veut aller brûler Nontron se présente au jour naissant au carrefour de la victoire, la sentinelle le jeune Dugas, ouvre le feu tuant le chef de la Milice et plusieurs de ses hommes.

Manu arrive aussitôt et engage le combat, un combat inégal puisque les assaillants sont quatre cents avec des voitures blindées et de l'artillerie, et qu'il n'a avec lui qu''une vingtaine d'hommes.

Pour assurer leur repli, Manu se sacrifie. Il reste seul à l'arrière avec un sac de grenades et tombe finalement grièvement blessé. Une scène atroce va alors se produire. Une meute de miliciens l'entourent, ils prétendent l'interroger, l'insultent et le torturent. La scène dure plus d'une heure. Aucun chef, aucune âme généreuse n'intervient pour abréger le supplice, les Allemands eux-mêmes dégoûtés se sont détournés. La lâcheté des bourreaux, qui sont des Français, dépasse en abjection tout ce que l'on peut imaginer. Ils crachent sur le beau visage du martyre jusqu'à ce que celui-ci se crispe en un dernier spasme.

Les renforts ont le temps d'arriver. L'affaire de Javerlhac se solde, en définitive, par un grand succès (cinquante morts du côté des miliciens et des Allemands, cinq seulement du côté maquis). 

Manu, Espagnol par le sang, Français par le cœur, est mort ce matin-là en héros d'épopée.


Ci-dessous, des photos prises en 2014 par Tony au 70ème anniversaire de la bataille de Javerlhac le 24 juillet 1944. Cérémonie à la stèle de Manuel Acébès qui un jour avait déclaré :  "Moi vivant, les boches ne rentreront jamais dans Javerlhac".









24 juillet 1944

L'Attaque contre la 2ième Cie

Extrait du journal de marche de la 2ième Compagnie (Manu) :

Le 24 juillet au matin, l’attaque se déclenche soudain avec violence. Des unités de l’armée allemande et de la Milice, bien renseignées et évaluées à quatre cents hommes, surgissent par les routes de Biée et d’Angoulême, fonçant sur notre barrage. Il est 7 h 15, les premiers coups de feu sont échangés entre les miliciens et la sentinelle avancée, H. Dugas, qui abat le capitaine de la Milice et plusieurs hommes. Dans une lutte inégale mais héroïque, il tombe frappé à mort, et rien ne sépare plus les assaillants de la ligne établie.

Rassemblés pour le jus, les hommes ont eu le temps de prendre leurs armes et d’organiser la défense. L’opacité du brouillard et le F.M. qui commence à crépiter freinent sérieusement l’avance de l’adversaire qui cherche à nous contourner en longeant le Bandiat. Le téléphone coupé par nous, un premier repli est effectué à 200 m en arrière du barrage. Déjà deux de nos camarades, Delaret et Lapeyronnie sont aux mains des miliciens et fusillés sur‑le‑champ.

Mais voici qu’arrivent deux de nos groupes, l’un de La Chapelle‑Saint‑Robert, l’autre de La Victoire, ce qui porte notre effectif à trente. Malgré l’écrasante supériorité de l’adversaire, la 2e Compagnie ne recule que pied à pied. Vaillamment, le chef Manu garde le contact et assure la retraite de ses hommes. Ruais grièvement blessé est pris par les miliciens et lâchement fusillé peu après au château des Forges. Venant de demander du renfort, P. Fauconnet, dit Flin, tombé avec sa voiture entre les mains de l’ennemi est aussitôt passé par les armes à la gare de Varaignes. Il est 9 h et l’on se bat encore au Grand‑Moulin, à 600 m seulement du barrage.

Voici enfin les premiers renforts ‑ des S.S.S. ‑ qui s’installent au passage à niveau des Forges. Le regroupement s’opère mais l’ennemi accentue sa pression au moyen d’automitrailleuses et d’artillerie légère, prenant à partie le village du Cousset. Le combat se déroule, coupé par de rares accalmies jusqu’à 14 h. Supérieurs en nombre, et surtout en matériel, les Allemands nous contraignent à la retraite. Dans un sursaut d’énergie, une dernière ligne de résistance est établie à Forgeneuve. Le F. M. du sergent Vinet fait le vide dans les rangs de l’assaillant. A. Magnan, dit Balo, est alors blessé à l’omoplate.

Voulant à tout prix atteindre Nontron avant la nuit, l’ennemi s’acharne et nous refoule jusqu’aux abords de Javerlhac. La partie semble perdue mais l’arrivée soudaine d’importants renforts renverse la situation. Inquiétés sur leur flanc droit par une arbalète du GM 1 et se croyant coupés, miliciens et Allemands rebroussent chemin.

Il est 16 h, en repassant la Milice fait sauter nos deux camions restés au barrage et incendie notre cantonnement. Piètre vengeance à côté de leurs soixante morts et blessés.

Le soir même, le barrage est réoccupé par les F. F. I., tandis que la 2ième Compagnie regroupée rend les honneurs funèbres à ses cinq héros.


A lire egalement :


Stèles commémorant la bataille de Javerlhac du 24 juillet 1944 (lien)
Javerlhac - Les ouvrages sur le 24 juillet 1944 (lien)
2016 : Photos de l'inauguration de la plaque à Jommelières commémorant la creation du groupe Manu (lien)
2015 : Photos de la commémoration de Javerlhac le 24 juillet 1944 (lien)
2014 : Photos du 70ème anniversaire de Javerlhac le 24 juillet 1944 (Partie 01) (lien)
Les hommes qui ont résisté par Jean-Pierre Reydy (lien)