Brigade Rac : Libération de Saintes le 4 septembre 1944


Rédigé par Alain dans la rubrique LibérationBrigade Rac

En septembre 1944, les jeunes résistants du bataillon Violette appartenant à la Brigade Rac, ont protégé la ville que voulait réinvestir une colonne de l'armée allemande. 


 Extrait du livre Les stèles du Bataillon Violette publié par l'Amicale du Bataillon Violette.

Le 1er septembre au soir, le Lieutenant Philippe Tenant de la Tour, dit « Marie Antoinette », accompagné de l'Adjudant Amrain, dit « Henry », prenait contact à Cognac avec le Sous-Préfet M. Rix, le maire M. Firinaud-Martel et les représentants de la Résistance locale afin de préparer l'arrivée des troupes.

Le 3 septembre, le Lieutenant Marie-Antoinette fut envoyé vers six heures du soir à Saintes pour préparer avec le Maire, le Sous-préfet et des représentants de la Résistance du groupe Papillon, l'hébergement et la nourriture des troupes dont l'arrivéétait prévue pour le 5.

Le 4 septembre était la grande foire de Saintes ; une soixantaine de soldats de la 10e compagnie sous la direction de leur chef, le capitaine Ferrand, arriva en ville a six heures du matin. Le Lieutenant Marie-Antoinette qui les accompagnait donna les instructions suivantes : un groupe sur la route de Bordeaux, un sur la route de Royan, un sur celle de Rochefort, deux groupes de part et d'autre du pont qu'ils devraient miner grâce au plastic fourni par la Résistance Fer de Saintes.

Le Capitaine Chaumette, chef des transmissions de RAC arriva également à Saintes. Il devait assurer notre liaison avec Cognac ou se trouvaient le P.C. du 3e bataillon puis plus tard, celui de RAC. Il avait une voiture avec un haut-parleur. Petit à petit, la population fut informée de notre présence et les drapeaux français commencèrent à orner les balcons de la ville. Le Lieutenant Marie Antoinette s'était assuré que les dispositions avaient bien été prises sur les différents axes qu'il avait fixés.  

Il était environ neuf heures trente lorsque, se rendant vers le groupe qui tenait la route de Royan, il fut hélé au travers d'une fenêtre de La Poste par une employée qui lui demanda s'il était le chef. Ayant répondu affirmativement, elle lui annonça qu'une colonne d'une douzaine de camions bourrés d'Allemands venait de traverser Pisany en direction de Saintes. Il lui demanda alors de prévenir aussitôt le P.C. de Violette à Cognac pour envoyer le maximum de renforts. Sa voiture était au garage, Marie-Antoinette alla prévenir les différents postes en courant ; ceux du pont sont ceux a qui il donna les dernières instructions au cas où les Allemands se présenteraient en haut de l'avenue donnant sur le pont. Il donne alors ordre aux policiers qui s'étaient mis a sa disposition de faire évacuer tout le champ de foire de l'autre coté de la Charente. Enfin, il chargea Chaumette grâce à son haut-parleur de faire rentrer les drapeaux et demander à la population de rester chez elle. Il s'assura au passage que son message avait bien été transmis a Violette et arriva au poste de la route de Royan au moment où les Allemands déboucheraient à la hauteur de la ferme Douillard.

Le groupe comporte onze hommes commandes par le Sergent Orliac. Trois avaient un fusil-mitrailleur et étaient placés en avant de la ferme Douillard ; ils signalèrent l'arrivée des troupes par deux petites rafales et se retirèrent vers le groupe de la route de Rochefort. Juste avant l'emplacement de la stèle du Bataillon, il y avait côté gauche de la route, un fusil-mitrailleur servi par André Marchand (19 ans), le tireur Lanxade (16 ans) son chargeur, et Mazières (18 ans) le pourvoyeur ; un peu en arrière, un bazooka servi par Habonneau (19 ans), et Chenu (19 ans), son chargeur. A droite, une mitrailleuse Bréda qui tomba en panne à la première rafale ; les trois servants s'en allèrent vers l'arrière. Quand la colonne fut entièrement déployée sur la ligne droite, le fusil-mitrailleur commença à tirer et Habonneau lança une roquette qui éclata sur le côté du convoi qui s’arrêta ; le chauffeur du premier camion, blessé, avait immobilisé son véhicule. Les Allemands commencèrent à sauter à terre et a se mettre dans la fosse gauche (venait de Saintes) ou dans les petites tranchées qui se trouvaient un peu en arrière à droite. Habonneau tira un deuxième projectile qui glissa sous le quatrième camion... Elle éclata en le soulevant... il retomba en travers, bloquant définitivement le convoi. Heureusement, car il ne lui restait plus qu'une roquette !.

Entre-temps, le Lieutenant Marie-Antoinette était retourné à La Poste rappeler Cognac, puis au pont, faire activer le minage et donner les dernières instructions au cas où les Allemands commenceraient à se présenter en face du Palais de Justice. Revenu sur la route de Royan, il croisa le Sergent Orliac blessé et qui était évacué vers l’hôpital. En route vers le fusil-mitrailleur de Marchand, il constata que le situation s'était stabilisée. Un commando allemand, très combatif, placé dans le fosse avec une mitrailleuse échangea des rafales avec Marchand, vers onze heures, Violette arriva, suivi du Corps Franc dont le chef, le Lieutenant Spack prit les opérations en main. Vers une heure de l'après-midi, tous les combattants du bataillon étaient sur place. Les 12e et 9e compagnies sur la route de Rochefort essayèrent d'encercler les Allemands mais leur resistance leur permit à la nuit de se retirer avec huit camions. 

André Schalk
Une embuscade avait été tendue en haut du dos d'âne en face du stand de tir pas les aspirants Shalck et Erhart de la 12e qui, au passage des camions tirent deux chargeurs chacun. Les pertes allemandes étaient considérables. Sur place, 17 cadavres dont le tireur de la mitrailleuse du fossé, un capitaine qui après trois blessures reçu alors qu'il essayait d'atteindre Marchand, fut abattu d'une balle en pleine tête. Il y avait aussi le chef de la Gestapo de Royan, un dénommé Goertz, dans la serviette duquel se trouvait la liste des civiles de Saintes à arrêter. La Résistance de Royan nous fit part de 182 tués ou blessés, y compris les 17 restés sur place. Nous avions à déplorer quatre tués : le Sergent Veyrat, Jean Durand, Marcel Gaillard et Gaston Bernard, ainsi que 10 blessés.
Après cette bataille, les troupes exténuées prirent du repos. D'autre part, comme la plus grande partie des munitions avait été consommée. Violette envoya le Lieutenant Marie-Antoinette a Bordeaux avec deux camions pour en récupérer. Le 6 septembre, « à quinze heures, le Bataillon défile impeccablement depuis le haut du Cours National jusqu’à la gare, dans une ville pavoisée et devant une véritable marée humaine » (Journal de Saintes, 7 septembre 1944).
La propagande de Vichy n'avait cessé depuis des mois de marteler que les F.F.I. n'étaient qu'un ramassis de voyous et de terroristes, sans foi ni loi. Pour démentir, Violette, au cours de ce défilé, fit asseoir à ses cotés dans sa voiture, l’aumônier du Bataillon, l'Abbé Giry, curé de La Coquille (Dordogne), en soutane d'un béret.
Ensuite les unités furent déployées autour de la route de Rochefort. Le 9 septembre, après des pourparlers entre le Commandant Meyer (représentant la Marine Nationale à Rochefort) et l'Amiral allemand, la 9e compagnie occupa la ville sans tirer de coup de feu. L'embouchure de la Charente était atteinte. Le Corps Franc s'installa le 10 au port du Chapus (embarcadère pour l'Ile d'Oléron) provoquant une violente réaction de l'artillerie de l'Ile. Il y eut plusieurs blessés parmi les habitants qui s'étaient approchés trop près de cette unité. Fin septembre, le bataillon fut relevé et retourna en Dordogne pour prendre du repos et se réorganiser.

Défilé à Saintes le 6 septembre 1944, Violette et les anciens combattants


La 12ième compagnie
La 9ième compagnie
Le monument élevé par la ville de Saintes à ses libérateurs


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