Extrait tiré du supplément du journal Forces Françaises - édité par la Brigade Rac (Dordogne-Nord) : Numéro 19 - décembre 1944. Les photos sont de André Léonard le photographe de la brigade Rac.
Ceci est l'histoire d'un maquis ...
Ceci est l'histoire d'un maquis ...
C'est une belle histoire que celle de la naissance d'un maquis...
Au début, il y a toujours la volonté tenace d'une poignée d'hommes. Et puis, le noyau grossit, s-installe, se forme, déménage, se disperse, se d'harceler l'enemmi, malgré les pertes, malgré la faiblesse de l'armement, malgré les coups durs, malgré tout.
Et c'est pourquoi toutes les histoires du maquis se ressemblent comme se ressemblent les épopées.
Aujourd'hui, c'est l'histoire du Groupe Roland, né au centre de la Dordogne, et qui vient de s'intégrer à la Brigade Rac, quelque part sur le front de Royan, que nous évoquons ici, en ce Noël de la Libération - comme un hommage à ceux qui ne désespèrerent jamais, dans les maquis de France...
La sentinelle sait quelle responsabilité est la sienne |
Août 1943 - Hors la loi...
Quand on prend le maquis, la première impression est de se trouver dans un monde à part, en dehors duquel tout être humain vous est hostile... On se croit différent de la veille... On regarde tout le monde un peu de travers ; le moindre bruit est une alerte...
Quatre heures du matin... Une douzaine d'hommes errent dans la campagne en plein bled, dans le nord de la Dordogne. Une voiture est venue les poser là... Ils ne savent pas très exactement où ils sont. Pour tout guide et tout espoir, un mot de passe et... le hasard. Tapis dans les broussailles, ils attendent le jour. C'est long... L'aube est froide... Enfin le jeune chef part seul et va frapper à la porte d'une maison isolée... Une brève conversation. L'habitant a un geste d'accueil. Il ne s'est pas trompé. Quelques instants plus tard le petit groupe est réuni et restera là jusqu'à la nuit venue...
Il fait sombre, il pleut. On marche dans les chemins noirs, on trébuche sur les cailloux, on marche dans les ruisseaux. Enfin un « Qui va là ? » Un mot de passe. Une lumière qui jaillit : un maquis.
- Je vous présente le lieutenant Roland et son groupe...
La vie de hors la loi commence...
Tout est à moitié enterré. Ils habitent par six dans des sapes couvertes de feuillages qui émergent à peine du sol. L'armement est composé de revolvers, de fusils de chasse. Aucun moyen de transport n'existe dans le groupe et le ravitaillement qui fait l'objet des expéditions nocturnes est ramené à dos d'homme, par tous les temps et par des chemins invraisemblables... Aucun de ces jeunes ne songe un instant à se plaindre... Ils ont choisi. On rit... On chante... pas trop fort. On veille aussi. La sentinelle sait quelle responsabilité est la sienne et ne dort pas...
- Je vous présente le lieutenant Roland et son groupe...
La vie de hors la loi commence...
Tout est à moitié enterré. Ils habitent par six dans des sapes couvertes de feuillages qui émergent à peine du sol. L'armement est composé de revolvers, de fusils de chasse. Aucun moyen de transport n'existe dans le groupe et le ravitaillement qui fait l'objet des expéditions nocturnes est ramené à dos d'homme, par tous les temps et par des chemins invraisemblables... Aucun de ces jeunes ne songe un instant à se plaindre... Ils ont choisi. On rit... On chante... pas trop fort. On veille aussi. La sentinelle sait quelle responsabilité est la sienne et ne dort pas...
Septembre 1943 - Premiers coups de main
Cinq heures du matin. Il fait un froid de canard. Une trentaine d'hommes s'entasse dans une bétaillère. La voiture file sur la route de Limoges vers Périgueux. Le camp Roland va rejoindre Sainte-Alvere où il doit rencontrer le chef départemental : « Mireille ».
Naturellement, il faut éviter de traverser Périgueux, car la Milice veille. On commence donc à faire une quantité de détours. On tourne à droite. Au bout de quelques instants ont lit sur une borne : Périgueux, 4 kms. On tourne à gauche... surgit une autre pancarte : Périgueux, 10 kms. On prend un autre chemin : Périgueux, 2 kms.
Bref, on ne le dépassait jamais... Et le jour se levait. Enfin on trouve la bonne route. A Saint-Pierre-de-Chignac, il faisait complètement jour et les habitants regardaient cette espèce de bateau nég hérissé de mitraillettes avec une terreur pleine d'admiration : « Ils ont quand même culottés ! Hein !...»
Les terroristes « sont très contents d'eux... ».
Bref, on ne le dépassait jamais... Et le jour se levait. Enfin on trouve la bonne route. A Saint-Pierre-de-Chignac, il faisait complètement jour et les habitants regardaient cette espèce de bateau nég hérissé de mitraillettes avec une terreur pleine d'admiration : « Ils ont quand même culottés ! Hein !...»
Les terroristes « sont très contents d'eux... ».
Enfin Ste-Alvere. Le camp. Présentations :
- Lieutenant Roland. Mon groupe.
- Chef Mireille. Vous serez chef de section chez moi.
- Lieutenant Roland. Mon groupe.
- Chef Mireille. Vous serez chef de section chez moi.
Ici le maquis est actif. On fait des coups de mains. Et le premier auquel le groupe Roland participe à ce moment là est celui du « piquage » des tenues dans des chantiers de jeunesse vers Ste-Livrade. Naturellement on avait résolu de faire une expédition nocturne et non moins naturellement la voiture tombe en panne et l'opération dut s'effectuer en plein jour sous les yeux mêmes de la population. Inutile de dire que le chargement à peine terminé, l'alerte fut vite donnée. La police reçut l'ordre de faire des barrages... Il fallut 38 heures pour rentrer... Ils avaient évité 18 barrages.
Si vous les aviez rencontrés ce jours-là vous auriez certainement eu peur : blousons, culottes de cheval et bottes, lunettes, revolvers au côté ces deux cyclistes ont tout l'air de ces terroristes dont on commence à parler à voix basse... Roland et Mireille vont faire une reconnaissance de terrain pour installer un maquis vers Rouffignac. Affamés par leur promenade, ils entrent dans un restaurant et commandent à dejeuner. Autour d'eux, les conversations vont leur train. On parle beaucoup d'un « coup » fait par les « maquis » sur les chantiers de jeunesse... On dit qu'ils ont eu 38 heures de voyage, et qu'ils ont franchi maints barrages... Les deux maquisards s'amusent beaucoup.
Si vous les aviez rencontrés ce jours-là vous auriez certainement eu peur : blousons, culottes de cheval et bottes, lunettes, revolvers au côté ces deux cyclistes ont tout l'air de ces terroristes dont on commence à parler à voix basse... Roland et Mireille vont faire une reconnaissance de terrain pour installer un maquis vers Rouffignac. Affamés par leur promenade, ils entrent dans un restaurant et commandent à dejeuner. Autour d'eux, les conversations vont leur train. On parle beaucoup d'un « coup » fait par les « maquis » sur les chantiers de jeunesse... On dit qu'ils ont eu 38 heures de voyage, et qu'ils ont franchi maints barrages... Les deux maquisards s'amusent beaucoup.
On avait prévu le déménagement de Ste-Alvere bien avant l'alerte. Et un matin, brusquement, 400 G.M.R. envahissent les environs du camp. Le camp est presque encerclé et il y aura de la bagarre. Ce sont pourtant des Français. Il faut à tout prix éviter de se tirer dessus. On part donc à la rencontre du commandant de la garde qui pose ses conditions :
- Une demi-heure pour fuir en laissant armes et bagages.Refus net des maquisards. Le Commandant s'arrache les chevaux de désespoir...
Alors les « terroristes » posent aussi leurs conditions : Ils lui font comprendre qu'il peut donner
plus d'une demi-heure...
- Nous sommes nombreux et bien armé (sic). Pendant deux jours vous allez fermer les yeux,
sans quoi c'est la bagarre...
Le commandant se rendit à raison, et pendant deux jours, on déménagea pour s'installer au
Thoriac, près de Neuvic...
Une chanson ! |
Partie de belotte à Boudeau |
Un anglais RAF avec nous
Les photos ci-dessus du maquis A.S. Dordogne-Nord sont l'oeuvre d'André Léonard, photographe de la Brigade Rac. Tous nos remerciements à la famille de René de la Tousche (Mission Alexander) pour avoir eu la gentillesse de partager ces photos.
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