Rédigé par Ludovic dans la rubrique Document et livre
Il est 00H30 lorsqu'un bombardement aérien d'une centaine de Lancaster (1) et Halifax (2) de la Royal
air Force prend pour cible la batterie de Merville (3) ce 6 juin 1944, facilitant l'opération des troupes aéroportées
du 9ième bataillon de parachutistes et de la 6ième division aéroportée
britannique confiées au lieutenant-colonel Terence Otway (4).
Si aucun signal de succès n'est transmis au croiseur léger britannique HMS Arethusa (5), un déluge de feu s’abattra à 5H30 précise. Telle fut la
mission assignée à ces troupes d'élites, neutraliser la batterie menaçant le
secteur de Sword Beach (6). Simple
sur le papier mais d'une complexité qui sur le terrain parut insurmontable.
A cause d'erreurs de navigations et d'un marquage aléatoire de la zone de
largage, les parachutistes du 9ième bataillon se trouvèrent dispersés à 16 km de leur cible et sans
le matériel adéquate pour mener à bien leur mission. A 2H50, 150 hommes sur les
600 rejoignirent Otway qui les scinda en 4 groupes d'assauts. A 5H00 les
combats cessèrent. Sur 130 hommes que comprenait la garnison allemande, six
soldats seulement étaient encore en état de combattre. Sur les 150
parachutistes britanniques participant à l’offensive, 65 furent tués ou
blessés. La prise de la batterie de Merville restera l’un des exploits du jour
J.
Une fois les alliés débarqués, la résistance et la direction des F.T.P. brûlèrent
d’envies de déclencher l’insurrection nationale, ce qui ne fait pas l’affaire
du maître du kremlin, Staline. Il sait que le partage de l’Europe se fera sur la
base des avancées militaires des différentes armées (armée rouge à l’est et les
Anglo-Saxons à l’ouest). Il est donc essentiel que ses troupes arrivent les
premières à Berlin et que les résistants communistes ne participent pas à la
lutte armée contre les nazis. Ordres qui ne seront pas suivis d’effets dans le
limousin avec Gingouin (7) et Tillon
(8).
Quelques semaines avant le débarquement à Lyon capitale de la résistance (9), les F.T.P ont à disposition une
organisation structurée. À sa tête se trouve le Comité Militaire de la Zone sud (C.M.Z) dont le
service B, réseau d’espionnages et organe de renseignements travaillant à la fois pour Moscou, mais
également pour Londres et l’OSS. En mai
1944, une vague d’arrestations déstabilise l’état-major des F.T.P dont très peu
vont réussir à y échapper. Si les soupçons se portent sur Boulanger, membre du Kominterm
(organisation clandestine des parties communistes) qui n’a pas été arrêté, le temps est compté pour les rescapés dont
l’objectif principal est de reconstituer au plus vite leurs réseaux en vue du
débarquement pour se lancer dans les opérations armées qui vont accompagner la
libération.
C’est André Marty (10) qui va à
la fin de la guerre relancer l’enquête. En contactant Georges Bayer (11), ce dernier par l’intermédiaire
d’un ancien dirigeant du service B, va retrouver Boulanger dans une caserne
militaire de Constance, où il cumule à sa fonction d’agent de la
sûreté Française en Allemagne celle
d’adjudant-chef d’un bataillon de chasseurs à pied. L’enquête s’arrête là, le Parti Communiste
Français ne souhaitant pas la voir se proroger.
En novembre 1946, la D.S.T
va appréhender un ancien agent de la Gestapo, spécialiste des renseignements et qui lèvera une partie du voile
concernant Boulanger. Alsacien né en Allemagne de père Français et de mère
Allemande, Boulanger est arrêté par la Wehrmacht en 1940 après avoir été mobilisé par
l’armée Française et libéré en tant qu’Alsacien. Transféré à Berlin lorsque les
Allemands découvrent qu’il est un communiste notoire, il devient un agent double de la Gestapo dont
le rôle est d’infiltrer la résistance dans le Sud-Ouest. En qualité d’ancien membre
du Kominterm et avec l’aide de Moscou, il se met en relation avec l’appareil
clandestin du Partie et est ainsi propulsé à l’état-major des F.T.P dans la
zone sud. Cette nomination lui permettra
de mener à bien sa mission dont l’une des conséquences fut en mai 1944 la
dénonciation de ses camarades permettant l’élimination matérielle et physique de
l’état-major des F.T.P.
Suite à ces déclarations et aux plaintes un an et demi plus tôt pour haute
trahison d’une ancienne déportée, Boulanger est arrêté en décembre 1946. Fait troublant, la presse communiste de
l’époque qui ne cesse de demander le châtiment exemplaire pour les traites ne
relaie pas l’information ce qui démontre que des consignes avaient été
demandées.
Lors du procès, Boulanger aura l’intelligence de jouer sur sa double nationalité. En effet suivant la convention de La Haye qui règlemente le droit international, un espion n’est autre qu’un auxiliaire d’une armée en campagne. Il ne peut donc être accusé de trahison ou d’intelligence avec l’ennemi. En 1955, il est libéré en bénéficiant d’un non-lieu, puis s’exile en Allemagne derrière le rideau de fer.
À lire également :
- Lancaster (lien)
- Halifax (lien)
- Batterie de Merville (lien)
- Biographie Terence Otway (lien)
- Croiseur HMS Arethusa (lien)
- Plage du débarquement Sword Beach (lien)
- Biographie Georges Gingouin (lien)
- Biographie Charles Tillon (lien)
- Alias Caracalla de Daniel Cordier (lien)
- Biographie André Marty (lien)
- Biographie Georges Bayer (lien)
Pour en savoir plus sur le Service B (édition Fayard) :
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