Rédigé par Alain dans la rubrique Pont Lasveyras
Comme à chaque cérémonie, le public venant des trois départements limitrophes s'était donné rendez-vous pour rendre hommage aux résistants tombés sous les balles allemandes (lien). Le maire de Beyssenac Francis Comby, a su trouver les mots pour apaiser les tensions naissantes sur la venue d'une délégation allemande menée par le consul d'Allemagne à Bordeaux, accompagné de Robert Hébras, rescapé de Oradour Sur Glane et de son ami Fritz Körber, représentant de la délégation allemande et la Région de Moyenne Franconie jumelée avec la Région du Limousin, ainsi que Raymond Frugier, Maire de Oradour sur Glane.
Le photographe Michael Staubes (lien) et l'historien Patrice Rolli (lien) ont eu la gentillesse de nous faire parvenir quelques photographies. Une vidéo de la cérémonie est également visible (lien). Vous trouverez à la suite des photographies l'ensemble des allocutions.
Interprétation par Barbara Auroux de la chanson "Ma Terre", écrite et composée par M. Bernard Delfigeas.
Photographie de Michael Staubes (contact) |
Photographie de Michael Staubes (contact) |
Photographie de Michael Staubes (contact) |
Photographie de Michael Staubes (contact) |
Photographie de Michael Staubes (contact) |
Photographie de Patrice Rolli |
Allocution de Mr Comby Maire de Beyssenac
Toujours autant de monde sur ce site, bien plus encore que d’habitude car c’est le 70ème anniversaire du massacre et on parle beaucoup de ce site depuis les aménagements débutés en 2009. Certains d’entre vous viennent ici pour la première fois mais la plupart connaissent déjà pour y être présents chaque année. Merci d’être fidèles à la mémoire de ces jeunes. Merci aux personnalités de nos trois départements, au Consul général d’Allemagne, à la délégation de Moyenne Franconie et aussi à ceux d’entre vous, notamment les porte-drapeaux, qui, depuis ce matin, ont assisté aux cérémonies à Saint-Yrieix, puis à Payzac et à La Chapelle de Savignac-Lédrier.
Vous n’oubliez pas que le 16 février 1944, par un temps froid et neigeux, 34 jeunes ont été sauvagement massacrés sur ce site, exactement là où vous êtes, entre le talus et la rivière Auvézère. Bien sûr, il ne ressemblait pas à ce que nous connaissons aujourd’hui puisque les bois ont remplacé les prés qu’il y avait ici, tout autour. Quelques jours avant le 16 février 1944, une centaine de jeunes étaient passés dans ce camp de l’Armée Secrète Dordogne Nord, des jeunes qui avaient rejoint la Résistance, des jeunes réfractaires au Service du Travail Obligatoire en Allemagne (STO), des maquisards issus d’autres groupes de Résistance tels que les Francs-Tireurs Partisans ou FTP. Tous ces jeunes s’opposaient, bien sûr, à l’oppression nazie et au régime de Vichy. Il n’est pas inutile de rappeler brièvement le récit de ce massacre tel qu’il figure dans le document « de référence » édité par l’Amicale des anciens résistants du bataillon Violette. Cela nous permet d’imaginer, même si c’est difficile, ce que ces jeunes ont subi ici. Il faisait froid, ils n’avaient, bien sûr, que le minimum pour manger et pour se chauffer, dormant dans le moulin et surtout à l’étage de l’habitation, qui servait aussi d’étable pour les vaches en dessous, habitation qui a été démolie dans les années 60 mais que vous pouvez voir sur une grande photo à l’entrée du moulin. Une cinquantaine de jeunes étaient présents la veille du massacre. Ces jeunes victimes étaient originaires du secteur, de la Dordogne (11), surtout du canton de Lanouaille (13), quelques-uns du canton de Saint-Yrieix (6), deux de la Corrèze (2) et les autres de plusieurs régions (17) de France. Ce camp était isolé, discret et difficile d’accès. C’est pour ça qu’il avait été choisi car les jeunes pensaient que c’était un lieu sûr.
Et pourtant ! Au matin du 16 février 44, un détachement allemand de 4 compagnies, en provenance de Limoges, est arrivé sur les lieux et a rapidement encerclé ce site du moulin. Scindé en trois groupes, les uns ont laissé leurs véhicules sur la route Payzac-Pompadour, côté Corrèze, au niveau de Beyssenac et ils sont arrivés par le sentier situé derrière la stèle, l’autre groupe par le côté Dordogne et le chemin venant du Pont Lasveyras, chemin que vous avez emprunté pour venir aujourd’hui, le troisième groupe arrivant du Moulin des Deux-Eaux, côté Haute-Vienne, et en longeant la rivière rive droite. Au lever du jour, les jeunes résistants ont été réveillés par des rafales de fusils-mitrailleurs et, peu armés, après s’être défendus pendant quelques heures, ils ont dû se rendre. Nous sommes en fin de matinée et, à ce moment-là, plusieurs jeunes avaient déjà été tués ou blessés dans l’attaque. Les blessés furent alors achevés froidement. Les autres ont dû se ranger en trois colonnes, ici même, entre la colline et la rivière. Les jeunes de l’une des colonnes ont été obligés de porter les armes et les caisses de munitions vers les camions stationnés sur la route, camions qui ont rejoint Limoges, puis Compiègne et les camps de déportation en Autriche. Les jeunes des deux autres colonnes ont été abattus ici-même. En tout, 34 cadavres ont été dénombrés dans les bâtiments et sur ce site. Pourquoi cette attaque ici, pourquoi contre ces jeunes ? Il y a plusieurs hypothèses. Bien sûr, des trahisons, notamment par deux jeunes qui avaient infiltré le maquis quelques jours avant le massacre et qui avaient quitté le camp la veille. On parle aussi du propriétaire du moulin et également, troisième hypothèse, d’un lien avec l’histoire de Sœur Philomène.
Et pourtant ! Au matin du 16 février 44, un détachement allemand de 4 compagnies, en provenance de Limoges, est arrivé sur les lieux et a rapidement encerclé ce site du moulin. Scindé en trois groupes, les uns ont laissé leurs véhicules sur la route Payzac-Pompadour, côté Corrèze, au niveau de Beyssenac et ils sont arrivés par le sentier situé derrière la stèle, l’autre groupe par le côté Dordogne et le chemin venant du Pont Lasveyras, chemin que vous avez emprunté pour venir aujourd’hui, le troisième groupe arrivant du Moulin des Deux-Eaux, côté Haute-Vienne, et en longeant la rivière rive droite. Au lever du jour, les jeunes résistants ont été réveillés par des rafales de fusils-mitrailleurs et, peu armés, après s’être défendus pendant quelques heures, ils ont dû se rendre. Nous sommes en fin de matinée et, à ce moment-là, plusieurs jeunes avaient déjà été tués ou blessés dans l’attaque. Les blessés furent alors achevés froidement. Les autres ont dû se ranger en trois colonnes, ici même, entre la colline et la rivière. Les jeunes de l’une des colonnes ont été obligés de porter les armes et les caisses de munitions vers les camions stationnés sur la route, camions qui ont rejoint Limoges, puis Compiègne et les camps de déportation en Autriche. Les jeunes des deux autres colonnes ont été abattus ici-même. En tout, 34 cadavres ont été dénombrés dans les bâtiments et sur ce site. Pourquoi cette attaque ici, pourquoi contre ces jeunes ? Il y a plusieurs hypothèses. Bien sûr, des trahisons, notamment par deux jeunes qui avaient infiltré le maquis quelques jours avant le massacre et qui avaient quitté le camp la veille. On parle aussi du propriétaire du moulin et également, troisième hypothèse, d’un lien avec l’histoire de Sœur Philomène.
Mais, aujourd’hui, nous ne cherchons pas à privilégier l’une ou l’autre de ces hypothèses. Nous souhaitons seulement, fermement et solennellement perpétuer la mémoire de ces jeunes. Pourquoi y a-t-il autant de monde aujourd’hui ? Parce que cette tragédie a marqué et choqué les familles et les habitants de tout ce secteur Dordogne Nord, Corrèze et Haute-Vienne où ces jeunes habitaient. C’était effectivement des jeunes, des civils, pas des militaires, âgés de 18 à 24 ans. La population les connaissait ou en connaissait au moins un, un fils, un frère, un voisin, un ami, …….. donc des jeunes du secteur et ce drame a marqué toute la population.
Parmi les 49 jeunes résistants présents lors de ce massacre, il faut citer aussi les 7 jeunes qui ont survécu à la déportation : Honoré Birolet (2009), Alexandre Bossavit (2011), Roger Delon (1989), Pierre Marchat (1973), Robert Maury (1958), Léon Promit (2006) et Jean Rémy (1986). Ces sept jeunes revenus des camps de déportation sont donc tous décédés aujourd’hui. N’oublions pas, également, les trois rescapés du massacre : Audor ou Parigot, dont on n’a aucune information, Roger Joubertie (décédé en 1984), tous deux se sont « cachés dans la rivière » et André Cubertafon, qui a été laissé pour mort et qui a pu être sauvé. Il est aujourd’hui le seul encore en vie ayant vécu ce 16 février (né en septembre 1923, 90 ans).
Effectivement, ces jeunes étaient âgés de 18 à 24 ans et ils auraient plus de 90 ans aujourd’hui. Nous pensons à eux. C’est donc la 70ème commémoration de ce massacre ! Pont Lasveyras : ce nom sonne à l’oreille de chacun, dans la région, comme un drame affreux. Dans les années à venir, nous devons être toujours nombreux pour le commémorer et inciter les jeunes générations à venir à cette commémoration, tout comme les deux jeunes filles, Pauline et ………….. qui ont procédé à l’appel des noms des 34 jeunes tués sur ce site et des 5 morts en déportation. Nous devons inciter les écoles et les collèges à venir ici.
C’est pour ne pas oublier que, lors de la cérémonie 2004, cela fait 10 ans jour pour jour, les élus des trois départements, dont la quasi-totalité d’entre eux sont encore là aujourd’hui, ont souhaité créer ce site de mémoire, site dit du Moulin de la Résistance du Pont Lasveyras. Le Pont Lasveyras est le pont moyenâgeux, classé monument historique, situé à 1 km en aval sur la rivière Auvézère. Notre but est de garder en mémoire ce qui s’est passé ici le 16 février 1944 et de faire en sorte que les jeunes générations sachent et se souviennent. Nous devons tous perpétuer ce devoir de mémoire, pour la paix et la liberté dans un esprit de fraternité et de tolérance. 70 ans après, nous ne saurons pas pourquoi ce massacre, mais là n’est pas l’essentiel !
L’essentiel, c’est le devoir de mémoire, le plus important à nos yeux aujourd’hui, pour ne pas que cela se reproduise, pour que les jeunes sachent. Je parle ici au nom du Moulin de la Résistance, c’est-à-dire les élus des trois départements, toutes tendances politiques confondues, élus qui ont œuvré pour ce site de mémoire, en accord avec l’Amicale des Anciens et Amis du bataillon Violette et avec l’Amicale des Familles et Amis des Victimes.
Il y a 10 ans, les anciens résistants nous ont demandé de prendre le relais. Nous l’avons fait. Nous devons également suivre le cours de l’histoire. Le sens de l’histoire, ce sont les rapprochements franco-allemands depuis plus de 50 ans, qui sont devenus l’amitié franco-allemande, au plus haut sommet de l’État. Il y a 6 mois, le Président de la République Française accueillait le Président allemand à Oradour sur Glane. Oradour, plus de 450 victimes. Aussi, je salue la présence aujourd’hui, parmi nous, de Robert Hébras, rescapé d’Oradour sur Glane, et de son ami Fritz Körber, représentant la délégation allemande et la Région de Moyenne Franconie jumelée avec la Région Limousin, et de Raymond Frugier, Maire d’Oradour sur Glane. Si nous avons aménagé ce site, c’est pour qu’il soit visité par tous.
Chacun doit pouvoir se recueillir ici, dans le calme et la sérénité. Je souhaite et je demande que les tensions de ces tout derniers jours s’apaisent, au nom du devoir de mémoire, au nom de ces jeunes victimes à qui nous pensons aujourd’hui. Ce Chemin de la Mémoire, que nous avons inauguré fin août dernier, doit nous y aider. Sur 10 panneaux, vous y lirez des éléments sur la Résistance en France, sur De Gaulle, Moulin, Michelet, Guingouin, sur les maquis de Dordogne, le maquis de Sarlande, le maquis de Payzac-Savignac, sur le massacre du 16 février, bien sûr,.….. et par la suite, sur La France libérée …… Il y a aussi des informations relatives à la nature et à l’environnement. Ce site intéresse le public.
Jusqu’en 2008, il n’y avait ici que la cérémonie annuelle du 16 février, et rien d’autre ! Le moulin était privé et l’on n’avait aucune autre information que cette stèle ! Depuis 2009, soit durant 5 étés, nous avons ouvert le moulin au public les samedis après-midi et les dimanches après-midi : 1000 visiteurs chaque année les week-ends de l’été, et donc quelques milliers de plus avec les visites libres toute l’année. Désormais, été comme hiver, même quand le moulin n’est pas ouvert au public, les visiteurs trouveront les informations relatives à cette tragédie grâce à ces 10 stations du Chemin de la Mémoire. Le site est devenu plus accessible. Nous avons restauré le moulin et la digue sur la rivière, les pelles du moulin, les abords… Nous avons aussi protégé et sauvegardé le patrimoine bâti constitué par cet ancien moulin à farine qui fait désormais partie du Pays d’Art et d’Histoire Vézère Ardoise auquel Beyssenac et le Pays de Pompadour appartiennent. Le bâtiment d’accueil permet d’avoir un abri et des toilettes accessibles. Sans les aides financières de l’État, du Conseil Régional du Limousin, du Conseil Général de la Corrèze, du Conseil Général de la Dordogne et des communautés de communes, Pays de Pompadour, Pays de Lanouaille, Pays de Saint-Yrieix - mention spéciale à la com com de Saint- Yrieix qui a acheté le moulin au départ, ce qui nous a permis de lancer nos projets - nous n’aurions pas pu mener à bien tous ces travaux, d’un coût global de plus de 400 000 € depuis 2007, sans tous ces partenaires. Nous avons eu également l’aide du Crédit Agricole de Lubersac, de la Fondation du Patrimoine et de 141 donateurs grâce à la souscription publique, l’aide de l’Amicale des Anciens et Amis du Bataillon Violette et de l’Amicale des Familles et Amis des Victimes. Je rappelle que le Moulin de la Résistance regroupe les communautés de communes de Pompadour, de Lanouaille et de Saint-Yrieix, un cas rare, peut-être unique, de coopération entre les élus de trois départements et de deux régions puisque nous sommes ici sur la commune de Beyssenac (Corrèze) ; de l’autre côté de la rivière et le chemin par lequel vous êtes arrivés et au Pont Lasveyras, c’est la Dordogne, Payzac et Savignac-Lédrier pas très loin ; et en amont de la rivière, la Haute-Vienne avec Glandon et Saint-Yrieix la Perche.
Donc un site qui rassemble tout le monde, quelles que soient les origines géographiques et les sensibilités diverses et respectables. Ne l’oublions pas !
Merci à tous pour votre présence.
Merci à la chorale de Saint-Yrieix qui va conclure cette cérémonie.
Merci aux hommes du 126ème Régiment d’Infanterie de Brive et à leur Commandant.
Merci aux porte-drapeaux, toujours très nombreux et fidèles à ce souvenir.
Merci au syndicat des transports scolaires du canton de Lanouaille qui a mis une navette à votre disposition depuis le parking.
Merci à M. Botter, propriétaire du pré servant de parking.
N’oublions pas le Pont Lasveyras. N’oublions pas le drame du 16 février 1944.
Interprétation par Barbara Auroux de la chanson "Ma Terre", écrite et composée par M. Bernard Delfigeas.