Rédigé par Tony dans la rubrique Section Spéciale de Sabotage, Média et cinéma, Brigade Rac
Marie Nancy Lasserre, réalisatrice de télévision vient d’achever le tournage d’un film sur la vie de son oncle Jacques Nancy, héros de la résistance dans le grand sud-ouest. Alors que le film « les saboteurs de l’ombre et de la lumière » vient juste d’être présenté au festival du film d’histoire de Pessac (33) et sur les écrans de France3 Aquitaine, Marie s’est gentiment prêtée au jeu et a bien voulu répondre à nos questions. Qu’elle en soit remerciée.
Marie Nancy Lasserre, réalisatrice de télévision vient d’achever le tournage d’un film sur la vie de son oncle Jacques Nancy, héros de la résistance dans le grand sud-ouest. Alors que le film « les saboteurs de l’ombre et de la lumière » vient juste d’être présenté au festival du film d’histoire de Pessac (33) et sur les écrans de France3 Aquitaine, Marie s’est gentiment prêtée au jeu et a bien voulu répondre à nos questions. Qu’elle en soit remerciée.
Histomag39-45 : Bonjour Marie. Je pense que le mieux pour nos lecteurs
qui ne vous connaissent pas encore est que vous vous présentiez à nous. Vous
êtes réalisatrice pour la télévision, pouvez-vous nous parler de votre parcours
et des films ou documentaires que vous avez déjà réalisés ?
Marie Nancy : Je suis en effet réalisatrice de télévision depuis plus
de 20 ans. J’ai réalisé de nombreux reportages sur la mer, les pêcheurs, les
marins, dont certains ont été diffusés dans l’émission Thalassa. Je me suis
également intéressé à l’archéologie et aux arts plastiques dans mes films.
HM : D’où vous
vient le goût pour les choses de la seconde guerre mondiale ? C’est
l’histoire de votre oncle, Jacques Nancy qui vous y a amené ?
MN : La seconde
guerre mondiale, la résistance et les maquis m’ont toujours beaucoup
intéressée. Toutefois, le fait d’avoir un oncle qui fut un chef de maquis
emblématique et un héros de la résistance a compté dans ma démarche pour
réaliser le film « Les Saboteurs de l’Ombre et de la Lumière ».
La famille Nancy, comme toutes les familles de résistants, était discrète, pudique et très taiseuse sur le passé de ses héros. Lors du second conflit mondial, ma grand-mère a eu ses trois fils engagés dans la Résistance et la clandestinité (maquis FFI et Corps-Franc Pommiès).
Les valeurs de la Résistance pour la défense de la Liberté ont accompagné toute mon enfance. Résistance à l’envahisseur pour préserver la souveraineté et l’indépendance de son pays et défendre les libertés citoyennes et individuelles. Du plus loin qu’il m’en souvienne, j’ai été bercée par ces mots, magiques et impressionnants pour une toute petite fille. Des mots prononcés par mes grands-parents, mes parents et leurs proches, des mots qui raisonnent encore dans ma mémoire et sont intimement liés à mes souvenirs d’enfance. Pour autant, l’héroïsme de mon père, de son frère cadet et surtout celui de mon oncle, n’était pas mis en avant chez les Nancy.
On disait quelquefois que Jacques avait été un héros, qu’il avait fait sauter des ponts, des routes, des trains… qu’il avait risqué sa vie pour libérer la France. On en parlait comme d’une histoire évidente, presque banale... Dans ma petite tête d’enfant, le héros était à la fois un être normal mais aussi magique par sa force de caractère. C’était toujours la fête, lorsque Jacques Nancy et sa jeune femme Maryse, résistante elle aussi, venaient chez nous. J’admirais la beauté de ce couple.
La famille Nancy, comme toutes les familles de résistants, était discrète, pudique et très taiseuse sur le passé de ses héros. Lors du second conflit mondial, ma grand-mère a eu ses trois fils engagés dans la Résistance et la clandestinité (maquis FFI et Corps-Franc Pommiès).
Les valeurs de la Résistance pour la défense de la Liberté ont accompagné toute mon enfance. Résistance à l’envahisseur pour préserver la souveraineté et l’indépendance de son pays et défendre les libertés citoyennes et individuelles. Du plus loin qu’il m’en souvienne, j’ai été bercée par ces mots, magiques et impressionnants pour une toute petite fille. Des mots prononcés par mes grands-parents, mes parents et leurs proches, des mots qui raisonnent encore dans ma mémoire et sont intimement liés à mes souvenirs d’enfance. Pour autant, l’héroïsme de mon père, de son frère cadet et surtout celui de mon oncle, n’était pas mis en avant chez les Nancy.
On disait quelquefois que Jacques avait été un héros, qu’il avait fait sauter des ponts, des routes, des trains… qu’il avait risqué sa vie pour libérer la France. On en parlait comme d’une histoire évidente, presque banale... Dans ma petite tête d’enfant, le héros était à la fois un être normal mais aussi magique par sa force de caractère. C’était toujours la fête, lorsque Jacques Nancy et sa jeune femme Maryse, résistante elle aussi, venaient chez nous. J’admirais la beauté de ce couple.
J. Nancy (écharpe rouge) et ses adjoints de la
section spéciale de sabotage
J’ai
donc grandi avec l’idée d’avoir un oncle qui se conduisit en héros entre 1939
et 1945, jusqu’à ce jour de mai 2007, où son fils adoptif me fit rencontrer en
Charente, les anciens maquisards de la Section Spéciale de Sabotage de Jacques
Nancy. Lorsque ces hommes âgés m’ont raconté de manière passionnée, drôle et
tendre - les larmes au bord des yeux - leurs souvenirs de sabotages et de
combats sous les ordres de leur capitaine, dit «le Pitaine», le choc émotionnel
fut très fort.
J’ai alors décidé de les revoir pour enregistrer leurs témoignages et réaliser un film en hommage à tous ces maquisards, saboteurs combattants et à leur chef. Un hommage préservant la plus grande rigueur historique et l’indépendance d’esprit qui me garderont à distance d’une hagiographie familiale.
Le fait d’être la nièce de Jacques Nancy m’a permis de rentrer, tout de suite, dans un état de proximité, de complicité et même d’intimité avec les maquisards de mon oncle. Grâce à ce climat exceptionnel de confiance et de générosité, j’ai pu recueillir des témoignages d’une réelle valeur historique, d’une grande intensité et d’une profonde émotion. C’est cette approche atypique, d’intimité avec les «acteurs» de mon sujet, qui a séduit mon producteur Grand Angle et les responsables de France 3.
J’ai alors décidé de les revoir pour enregistrer leurs témoignages et réaliser un film en hommage à tous ces maquisards, saboteurs combattants et à leur chef. Un hommage préservant la plus grande rigueur historique et l’indépendance d’esprit qui me garderont à distance d’une hagiographie familiale.
Le fait d’être la nièce de Jacques Nancy m’a permis de rentrer, tout de suite, dans un état de proximité, de complicité et même d’intimité avec les maquisards de mon oncle. Grâce à ce climat exceptionnel de confiance et de générosité, j’ai pu recueillir des témoignages d’une réelle valeur historique, d’une grande intensité et d’une profonde émotion. C’est cette approche atypique, d’intimité avec les «acteurs» de mon sujet, qui a séduit mon producteur Grand Angle et les responsables de France 3.
Les
hommes de la Section Spéciale de Sabotage, ces
baroudeurs des forêts d’Horte, de Bois-Blanc, de Chasseneuil en Charente, mais
aussi de Puycharnaud, de Piégut, de Saint-Estèphe en Dordogne, attendent depuis
70 ans qu’on reconnaisse leur rôle déterminant de saboteurs de routes, de
ponts, de pylônes, de locomotives et de chemins de fer… et surtout de
combattants qui ont sauvé de nombreuses vies, notamment lors de la Libération
d’Angoulême, de Saintes et de Niort, faits encore trop peu connus du grand
public.
La réalisation de ce film, Les Saboteurs de l’Ombre et de la Lumière, sera un évènement majeur pour leurs familles* et l’occasion unique de rendre l’hommage mérité au Capitaine Jacques Nancy et à tous ces résistants venus de Poitou-Charentes, du Limousin et d’Aquitaine pour défendre leur territoire et leur région, leur pays. Certains d’entre eux, ont fait le sacrifice héroïque de leur vie pour nous épargner la barbarie nazie afin que nous puissions, aujourd’hui, vivre libres dans une France souveraine. En tant que réalisatrice, « passeur de mémoire » et nièce de Jacques, j’ai le devoir de faire ce film pour sortir ces héros de l’ombre et les mettre en Lumière.
La réalisation de ce film, Les Saboteurs de l’Ombre et de la Lumière, sera un évènement majeur pour leurs familles* et l’occasion unique de rendre l’hommage mérité au Capitaine Jacques Nancy et à tous ces résistants venus de Poitou-Charentes, du Limousin et d’Aquitaine pour défendre leur territoire et leur région, leur pays. Certains d’entre eux, ont fait le sacrifice héroïque de leur vie pour nous épargner la barbarie nazie afin que nous puissions, aujourd’hui, vivre libres dans une France souveraine. En tant que réalisatrice, « passeur de mémoire » et nièce de Jacques, j’ai le devoir de faire ce film pour sortir ces héros de l’ombre et les mettre en Lumière.
* Nota :
Certains enfants et petits-enfants jouent le rôle de leurs parents et
grands-parents résistants dans le film.
J.Nancy
et son équipe en Dordogne
HM : Parlez-nous
de votre oncle, de son parcours pendant la guerre et de son maquis spécialisé
dans le sabotage en Charente.
MN : Jacques
Nancy naît le 12 septembre 1912 à Carthage, en Tunisie.
Sa famille rentre en France assez vite après sa naissance et s’installe à Pau,
en Béarn.
Ingénieur électricien de formation, très sportif, Jacques est mobilisé le 26
Août 1940.
Envoyé sur le front de l’Aisne, il est fait prisonnier à Germonville en Juin
1940. Il connaît la dureté des stalags allemands, fait trois tentatives
d’évasion. La troisième sera la bonne….
De retour à Pau, il rentre en contact avec un réseau dépendant du SOE, Section
Française des services secrets anglais du Colonel Maurice Buckmaster. Ce
réseau, étant infiltré par l’ennemi Jacques est recherché, il décide alors de
quitter la France par l’Espagne afin de rejoindre les Forces Françaises Libres
à Londres.
Un peu après la frontière espagnole, il est arrêté et se retrouve durant 6 mois au tristement célèbre camp d’enfermement de Miranda. Malgré la faim, le froid et la vermine, il tient bon et une intervention diplomatique canadienne, le fait libérer. Il peut alors regagner Londres, passer les difficiles tests des FFL à Patriotic School et suivre l’entraînement dans les camps anglais (close-combat, parachutisme, techniques de sabotages, maniement des armes, codages décodages radio…), afin de repartir en mission en France.
Les archives des services secrets anglais témoignent des interrogatoires et du passage de Jacques Nancy dans leurs rigoureux camps d’entraînement. Nancy est engagé au BCRA (Bureau Central de Renseignement et d’Action) créé par le Général de Gaulle et le Colonel Passy. En tant qu’officier parachutiste et chef saboteur, il est envoyé en France en novembre 1943 aux côtés de Claude Bonnier, Délégué Militaire Régional de la Région B (Aquitaine élargie aux deux Charentes et aux Deux-Sèvres).
Un peu après la frontière espagnole, il est arrêté et se retrouve durant 6 mois au tristement célèbre camp d’enfermement de Miranda. Malgré la faim, le froid et la vermine, il tient bon et une intervention diplomatique canadienne, le fait libérer. Il peut alors regagner Londres, passer les difficiles tests des FFL à Patriotic School et suivre l’entraînement dans les camps anglais (close-combat, parachutisme, techniques de sabotages, maniement des armes, codages décodages radio…), afin de repartir en mission en France.
Les archives des services secrets anglais témoignent des interrogatoires et du passage de Jacques Nancy dans leurs rigoureux camps d’entraînement. Nancy est engagé au BCRA (Bureau Central de Renseignement et d’Action) créé par le Général de Gaulle et le Colonel Passy. En tant qu’officier parachutiste et chef saboteur, il est envoyé en France en novembre 1943 aux côtés de Claude Bonnier, Délégué Militaire Régional de la Région B (Aquitaine élargie aux deux Charentes et aux Deux-Sèvres).
La Région B à laquelle
sont destinés Claude Bonnier et Jacques Nancy est «infectée» par la collusion
d’André Grandclément, chef du mouvement résistant de l’Organisation Civile et
Militaire en Aquitaine, avec la Gestapo et le «pacte» signé avec le redoutable
chef de section de la Gestapo Bordeaux, Friedrich Wilhelm Dhose.
Ce «pacte» consiste en la livraison de caches d’armes du réseau OCM contre la
libération de certains résistants arrêtés par la Gestapo et la police de Vichy,
dirigée à Bordeaux par Napoléon Poinsot.
Maquis reconstitué pour le tournage
Certaines des armes livrées par Grandclément à la Gestapo
seront retrouvées entre les mains des soldats de la «Division Das Reich» qui
opéra le massacre d’Oradour-sur-Glane…
Dans ce contexte de «région pourrie», Bonnier et Nancy ont pour mission de rassurer, de restructurer et
d’armer les différents mouvements et réseaux de résistance de cette région,
afin de préparer militairement le débarquement allié de juin 44.
En moins de 3 mois, Claude Bonnier et Jaques Nancy forment et structurent
70 groupes de combattants en Région B (Deux-Sèvres, Charente,
Charente-Maritime, Gironde, Landes, Pyrénées-Atlantiques). Bonnier et Nancy se
sont tout de suite entendus et estimés.
D’émouvants écrits de l’un et de l’autre en témoignent dans les archives des
services secrets anglais ainsi que dans les archives françaises du BCRA.
Mais Claude Bonnier est victime de la trahison de Grandclément et de la
jalousie de certains «petits chefs» de l’OCM qui prennent ombrage de son
arrivée en Région B. Le 9 février 44, Bonnier se rend chez son radio à Bordeaux
pour passer des messages à Londres. Il ne sait pas que celui-ci a été
« retourné » par l’ennemi et qu’il va le trahir. Bonnier est arrêté
par la police de Vichy alliée à la Gestapo de Bordeaux. Ne voulant pas prendre
le risque de parler sous la torture, il avale sa pilule de cyanure dans les
geôles de la gestapo du Bouscat, avant même son interrogatoire par Dhose.
Claude Bonnier, Délégué Militaire Régional de
la Région B
Jacques Nancy est recherché (sa tête est mise au prix de 4
millions de francs). Bien plus, il a perdu son chef et ses bases. Il rentre
alors dans une totale clandestinité, il crée son propre maquis, une unité de
saboteurs et de combattants : la
Section Spéciale de Sabotage qui
appliquera à la lettre les plans militaires de Londres pour accompagner le
débarquement des alliés (sabotage de trains, de voies ferrées, de dépôts de
locomotives, de pylônes électriques et téléphoniques, d’usines de cuir, de
résine, destructions d’automitrailleuses, de véhicules blindés…). Mais bien plus important encore
que ses spectaculaires actions de sabotage, la Section Spéciale de Sabotage
(SSS) devient à l’été 44, une unité de combattants.
Le 24 juillet 44, la SSS vient en renfort d’un groupe de l’Armée Secrète de Dordogne
Nord,
la Brigade RAC (menée par
Rodolphe Cézard, dit «RAC»), qui rencontre des difficultés aux portes de la
ville de Nontron, au lieu-dit Javerlhac.
Les hommes de Nancy se retrouvent face à une colonne de 500 soldats allemands
et miliciens, lourdement équipés d’automitrailleuses, qui remontent vers le
front de l’Est.
La colonne se veut punitive, elle a fait savoir sa ferme intention de faire de
Nontron une nouvelle cité martyre, car la ville est réputée être un refuge de
résistants.
Jacques Nancy en décembre 44 qui a rejoint le 50ème RI
A un contre dix, les
hommes de Jacques Nancy livrent bataille et barrent la route à l’ennemi. Durant
cette longue journée de combat, sans perdre un seul de ses hommes, la SSS
libère les maquisards de la Brigade RAC, empêche allemands et miliciens d’aller
plus avant et évite le massacre de la population de Nontron. Les survivants de Javerlhac, rendent unanimement
hommage au courage, à la ténacité et aux qualités de stratège du Capitaine
Jacques, en ce jour. La bataille de
Javerlhac eut lieu un mois et demi après le massacre d’Oradour-sur-Glane…
C’est un épisode peu connu du public qui compte pourtant parmi les
héroïques combats de la résistance en Aquitaine.
Le Capitaine Jacques et ses maquisards ont stoppé la colonne avant qu’elle
n’exécute son sinistre plan. Ils l’obligent à regagner Angoulême où ils la
traquent jusqu’à la Libération de la ville, le 31 Août 44. Associée à RAC et à
des maquis FTP, la SSS déloge alors Allemands et miliciens de la capitale
charentaise. Albert Gin, l’un des hommes de la SSS, arrache le drapeau rouge à
croix gammée qui flotte sur le toit de la mairie d’Angoulême pour y planter le
drapeau tricolore…En fin d’année 1944, la
SSS rentre dans l’armée régulière, au 50ème RI.
En uniforme de capitaine, Jacques Nancy dirige toujours ses maquisards devenus
des soldats. Ensemble, ils participent au siège et aux longs combats de la
«poche de Royan», ils libèrent ainsi les deux Charentes. Puis, intégrés dans
l’armée Rhin et Danube, ils partent pour le front de l’Est, poursuivre les
Allemands jusqu’à l’armistice de mai 1945.
HM : Quel angle avez-vous adopté pour mettre en image l'histoire de votre oncle et de son maquis ?
MN : J'ai choisi de m'intéresser à la fois à la Grande Histoire dont font partie tous les hommes dont je parles, mais aussi à leur vie au quotidien, aux détails humains de tous les jours, au charisme et à la relation très forte quasi filiale, du chef résistant Jacques Nancy pour ses maquisards.
HM : Quel angle avez-vous adopté pour mettre en image l'histoire de votre oncle et de son maquis ?
MN : J'ai choisi de m'intéresser à la fois à la Grande Histoire dont font partie tous les hommes dont je parles, mais aussi à leur vie au quotidien, aux détails humains de tous les jours, au charisme et à la relation très forte quasi filiale, du chef résistant Jacques Nancy pour ses maquisards.
HM : Est-ce que
la mise sur pied de votre projet s’est réalisée facilement ? En cette
année de commémoration du débarquement la chose militaire « marche »
bien sur les antennes. Avez-vous bénéficié de cette vague d’intérêt ?
MN : La
production de ce film a été très difficile à monter. Le film lui-même a connu
des moments très durs dans sa réalisation technique et du point de vue de son
écriture et de son contenu créatif. J’ai serré les dents et les poings car je
suis auteur et réalisateur (j’écris mes scénarii et je réalise) et heureusement
le film existe aujourd’hui. Il est très bien reçu par les professionnels
(producteurs, diffuseurs, festivals) grâce à mon équipe et à beaucoup de
bénévolat et une énorme chaîne solidaire et amicale… Un film, c’est toujours
une aventure humaine avec des désirs, des frustrations, des déceptions mais
aussi des miracles et des grands moments de bonheur, de joie et d’amitié.
Autre scène de tournage du film
HM : Parlez-nous
des coulisses du tournage de votre film « les saboteurs de l’ombre et de
la lumière ». Vous avez été soutenue par des entités locales ? Aidée
par des associations ?
MN : Pour
l’instant, j’ai plus reçu l’aide du milieu professionnel et celui du milieu
associatif que des territoires…Jacques Nancy se battait et rêvait d’une France
souveraine et solidaire. Il serait déçu de la voir aujourd’hui.
HM : Sur le blog
consacré à votre film, on voit pas mal de matériels (armes, équipements,
outils…). Comment vous êtes-vous procuré tout ce matériel ?
MN : J'ai eu la
chance de travailler avec trois associations de collectionneurs qui
interviennent avec leurs propres armes, équipements, véhicules, uniformes et
vêtements de l'époque.
Ces trois associations sont
:
- Le MVCG
Dordogne
- Le 32nd Field
Artillery Battalion and Co
- Les Oies Sauvages
Ils sont formidables et sont
capables de reconstituer des accrochages, des combats et la vie des maquis en
clandestinité dans les forêts. Ce sont de vrais comédiens. De plus, ils
connaissent très bien l'histoire, la vie dans les maquis, les armes utilisées
et les techniques de combats. Je les salue ici, car sans eux et les scènes
fictionnelles réalisées grâce à leur concours, mon film ne serait pas ce qu'il
est....
HM : C’est
Jean-Louis Crémieux-Brilhac qui est votre conseiller historique sur le tournage
de votre film. Vous pouvez nous dire quelques mots sur cette personnalité
historique ?
Jean-Louis Crémieux-Brilhac
MN : Jean-Louis Crémieux-Brilhac, est un historien
reconnu, résistant de la France Libre, il a rejoint Londres le 9 Septembre
1941. Au printemps 1942, le Général de Gaulle le nomme Secrétaire du Comité de
la Propagande Clandestine. Ces livres d’historien, notamment sur la France
Libre, les Français de l’An 40 ou encore les Anglais dans la résistance, sont
des ouvrages de référence sur le second conflit mondial. Pour Jean-Louis
Crémieux-Brilhac, communiquer avec la France et l’Europe grâce à la BBC, c’est
résister.
Par la radio, Londres envoie des ordres militaires et des missions
aux mouvements armés de la Résistance et des messages de motivation et d’espoir
à la population française. Les messages secrets et codés, transmis par la BBC à
la résistance intérieure sont essentiels. Les émissions et messages en clair
sont tout aussi importants pour la population civile, car ils permettent de la
guider, de la mettre en garde en rétablissant la vérité, face aux mensonges de
la radio du Maréchal :
« Radio Paris
ment, Radio Paris est allemand… ».
Les émissions de Londres doivent redonner espoir en la victoire, la liberté et
la souveraineté de la France.
Michel Roger Augeard, dans son excellent livre sur le rôle essentiel de la BBC,
« Melpomène se parfume à l’Héliotrope », estime à plus de
cinquante mille, les messages qui furent ainsi envoyés par Londres entre fin
1940 et fin 1944. Depuis que je me suis lancée dans des recherches sur la
Résistance en Aquitaine et en Région B, Jean-Louis Crémieux Brilhac a guidé,
accompagné et orienté mon travail de réalisatrice documentariste de télévision.
Toujours bienveillant, disponible et à l’écoute, il m’a apporté sa connaissance
et ses conseils avisés avec élégance et générosité.
Autre
scène de tournage dans les rues de Bordeaux
HM : Au téléphone vous m'avez dit être très concernée
par le devoir de mémoire. Votre film en est une pour vous une façon de s'y
consacrer?
MN : Oui, complètement. La résistance française est un
fait unique dans l’histoire du monde. Un pays qui a deux gouvernements :
un qui « résiste » depuis son exil de Londres et l’autre, sur le
territoire national, qui « pactise » et collabore outrancièrement
avec l’occupant. Et entre les deux, un peuple de clandestins armés qui décident
de ne pas se résigner, de résister, de harceler l’ennemi, de soutenir et
d’accompagner la libération du pays à l’arrivée des alliés. Il ne faut jamais
oublier ce fait historique unique qui est une sorte de miracle français !
Ce n’est pas un hasard si cette configuration politique et guerrière très
complexe s’est déroulée et a réussi en France.
MN : Votre travail est superbe et indispensable pour
protéger, garder et transmettre la mémoire de l’Histoire et des histoires
humaines justement. Afin de montrer aux jeunes d’aujourd’hui que les héros, les
modèles, les belles personnalités, les beaux destins existent au sein même de
l’histoire de notre pays, la France. De plus la résistance est une histoire
très proche de nous, moderne et contemporaine. Nous vivons aujourd’hui sur ses
acquis fondamentaux, ceux du CNR (Conseil National de la Résistance) avec la
Sécurité Sociale pour tous, notre système de retraite et les valeurs d’égalité
et de solidarité. Il suffit de s’y replonger un peu pour le constater… Alors
pourquoi aller chercher des modèles ailleurs ?
HM : Avez-vous d’autres projets de tournage en relation
avec la seconde guerre mondiale ?
MN : Oui, j’ai trois projets en cours, mon préféré
serait de réaliser une fiction de la vie de Jacques Nancy.
Ndlr : Remerciement à Tony
Perrinet, membre du forum le monde en guerre sous le pseudo de titinet16 qui a
participé au film comme figurant. Il a grandement facilité la réalisation de cette
interview.
Photos : Marie Nancy
Autre scène du
tournage au mémorial de Chasseneuil où est inhumé Jacques Nancy
Ci-dessous les décorations de
Jacques Nancy :
-
Commandeur
de la Légion d’honneur
-
Médaille
militaire
-
Croix de
guerre avec 7 citations
-
Médaille
de la résistance
-
Médaille
des évadés
-
Military
cross
Merci à l'équipe d'Histomag du forum www.39-45.org (lien) qui m'a donné l'autorisation de présenter cette interview sur ce blog.
A lire également :
Film sur Jacques Nancy : photos du tournage (lien)
DVD et tapis de souris du film "Les Saboteurs de l'Ombre et de la Lumière" (lien)
Mémorial Claude Bonnier "Hypoténuse" - Angeac-sur-Charente (lien)
Stèles commémorant la bataille de Javerlhac du 24 juillet 1944 (lien)
Articles du blog sur la Section Spéciale de Sabotage (lien)
DVD et tapis de souris du film "Les Saboteurs de l'Ombre et de la Lumière" (lien)
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